Amani Bahati, coeur audacieux

Elle s’appelle Amani Bahati. Ses noms signifient en français « Paix » et « Chance ». Pour l’instant, ils ne décrivent vraiment pas ce qu’elle traverse. À 30 ans, mère de cinq enfants, elle a été contrainte de fuir la cité Sake pour échapper aux ravages des rebelles du M23 qui menaçaient sa cité à Karuba.

Le souvenir de ce jour tragique où tout a basculé reste gravé dans son esprit. Alors qu'elle travaillait dans un champ de manioc, les premiers échos du conflit l'ont forcée à fuir en toute hâte, laissant derrière elle tout ce qu'elle avait. Son mari l'aide à transporter leurs enfants, à l'extrémité de la ville de Goma, dans le camp de BULENGO.

Dans ce camp, la vie est une lutte du jour au lendemain. Les secours sont rares, laissant Amani et sa famille dans le besoin. Pour subvenir à leurs besoins, elle a commencé à vendre des morceaux d'ananas devant leur humble demeure. Chaque jour, elle se lève avec courage pour affronter les défis de sa nouvelle réalité, espérant un avenir plus ou moins meilleur.

À travers les péripéties de son quotidien, Amani rêve d'un avenir où la paix régnera à nouveau, où elle pourra retrouver son chez-soi, sa terre, et reconstruire un avenir sûr et stable pour ses enfants.

L'organisation Goma Actif vient en aide aux enfants et femmes âgées dans les camps de déplacés en préparant de la bouillie trois fois par semaine. Vous pouvez soutenir leurs actions en contribuant sous ce lien.

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Cœur audacieux, c’est une série d’histoires de ces femmes congolaises qui ont marqué l’histoire et impacté positivement le quotidien de la communauté congolaise. Une série racontée par l’équipe de rédaction de MNKF Créatives.

Maria Nabaronga, coeur audacieux.

C’est l’histoire de Maria Nabaronga. À 80 ans, elle porte avec elle des années et des souvenirs, déplacée de sa terre de la cité de Sake par les tourments de la guerre qui oppose les rebelles du M23 aux Forces armées congolaises.

Aujourd’hui, elle vit dans le camp de déplacés de Bulengo.

Dans ce lieu où la survie est une lutte quotidienne, où la dignité est souvent piétinée, Maria témoigne de son désarroi. Elle déplore le fait que leur vie ne semblait avoir aucune importance, que la mort d'un des leurs ne suscitait que indifférence, même de la part des autorités congolaises.

Au-delà de la désolation et de la résignation, Maria garde une étincelle d'espoir. Espoir que leurs voix soient entendues, que leur souffrance ne soit pas vaine, que la solidarité et la justice viennent enfin dessiner un avenir plus clément pour les déplacés de guerre.

L’organisation Goma Actif vient en aide aux enfants et femmes âgées dans les camps de déplacés en préparant de la bouillie trois fois par semaine. Vous pouvez soutenir leurs actions en contribuant sous ce lien.

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Cœur audacieux, c’est une série d’histoires de ces femmes congolaises qui ont marqué l’histoire et impacté positivement le quotidien de la communauté congolaise. Une série racontée par l’équipe de rédaction de MNKF Créatives.

La sculpture moderne dans un monde traditionnel

Kambale Augustin Styno est un artiste sculpteur dévoué qui s'efforce de repousser les limites de la sculpture en RDC. À travers ses œuvres, il transmet des messages forts et cherche à changer les perceptions traditionnelles sur l'art africain. Son engagement et sa passion pour cet art ancestral font de lui un artiste à suivre de près, car il continue de façonner le paysage artistique de sa région avec talent et détermination.

L’environnement a joué un grand rôle dans le développement de la passion de Styno. Son oncle, lui-même artiste sculpteur, a été sa première source d’inspiration dès son plus jeune âge, l'initiant ainsi à cet art fascinant. Les amis de Kambale qui étaient également impliqués dans la sculpture l'ont encouragé à plonger davantage dans ce monde qui est devenu sa passion inébranlable. « C’est à partir de mon oncle que j’ai eu l’occasion d’avoir contact avec cet art », a-t-il avoué. « Mes amis m’ont permis de plonger encore plus dans ce monde artistique qui ne m’a plus quitté jusqu’à présent ». 

La passion, rien que la passion !

Pour l’histoire, la sculpture africaine remonte à des milliers d’années. Cette forme d’expression artistique est profondément enracinée dans les traditions et les croyances des différentes cultures africaines, et elle a évolué au fil du temps pour refléter les changements sociaux, politiques et religieux du continent. 

Bien qu'il ait terminé ses études en agronomie, pour Kambale, c'est sa passion pour l'art qui a prévalu sur ses études. Contrairement à d’autres disciplines artistiques comme la musique ou la danse, la sculpture est un domaine qui reste encore rare dans la pratique au sein de sa région au Nord-Kivu. Il a cherché des moyens de se démarquer en tant que jeune sculpteur.

« Je suis motivé car la sculpture, dans ma communauté, ce n’est pas trop pratiqué par plusieurs personnes de mon âge. Ce sont les vieux qui font la sculpture généralement. Ils faisaient des statuts en bois », a souligné Kambale dans l’interview qu’il nous a accordée. 

Dans sa famille, il a rencontré à la fois du soutien et des réticences quant à son choix de faire de sa passion artistique son métier. Malheureusement, son père faisait partie des personnes qui étaient initialement opposées à son choix, mais avec le temps, il a fini par comprendre que son fils pouvait vivre de sa passion. Aujourd'hui, il l'encourage pleinement dans sa carrière artistique.

Changer la mentalité sur l’art ancestral 

S’il a su prouver sa famille à l’emboîter, d’autres obstacles l’attendent. Kambale se confronte à plusieurs défis dans son parcours d'artiste, en particulier en raison de l'insécurité qui sévit dans l'Est de la RDC, l’accès aux matériaux de travail constitue un défi majeur pour lui. De plus, il doit faire face à la difficulté de faire comprendre aux clients la portée artistique de ses œuvres, sans qu'elles soient constamment comparées aux sculptures ancestrales perçues comme relevant de la sorcellerie. «  La transition entre ces deux mondes impacte négativement sur la discussion du marché », révèle-t-il avant de continuer sur la même lancée : « Certaines personnes ont encore cette philosophie archaïque de dire que toutes les œuvres sculptées ressortent de la sorcellerie ». 

Les sculptures africaines étaient souvent utilisées dans les rituels religieux, des cérémonies communautaires et des pratiques de guérison. Elles étaient considérées comme des objets sacrés, capables de canaliser les forces spirituelles et de communiquer avec les ancêtres. 

Kambale souhaite changer cette perception archaïque en transmettant des messages à travers ses sculptures. Il réussit petitement car « Heureusement, certains commencent à comprendre qu'il est possible de transmettre un message puissant par le biais de la sculpture », s’est réjouit Kambale. 

L’artiste kivutien fait donc partie de cette génération des sculpteurs africains contemporains qui ont commencé à intégrer des éléments de l’art traditionnel dans leurs œuvres tout en explorant de nouvelles formes d’expression. Ils utilisent cet art pour raconter des histoires, pour revendiquer des identités culturelles et pour dénoncer les inégalités sociales. La paix, l’amour, la résilience ou le courage peuvent être aussi transmis par ce moyen puissant. 

Un hommage à Luc Nkulula par un buste 

Lorsqu'il se met au travail, Styno se déconnecte du monde réel pour se connecter à son esprit, qui lui dicte sa création. Il accorde une grande importance à l'écoute de son intuition, ce qui lui a permis de développer une patience humaine exceptionnelle. Chaque sculpture devient ainsi une expérience spirituelle unique pour l’artiste qui a un engagement envers le patrimoine culturel congolais. 

Parmi les œuvres marquantes de Kambale, figure le buste de Luc Nkulula. Ce dernier était un militant congolais des droits de l'homme et un défenseur de la démocratie en RDC. Il est né en 1987 à Goma, dans la province du Nord Kivu, et a grandi dans un contexte marqué par la guerre et l'instabilité politique. Il est devenu un leader étudiant et a joué un rôle actif au sein du mouvement LUCHA (Lutte pour le Changement) à Goma. Il a été arrêté à plusieurs reprises pour son activisme et a fait face à des intimidations et des menaces.

Le 10 juin 2018, Luc Nkulula wa Mwamba est mort dans une incendie à son domicile. Sa mort a provoqué une onde de choc en RD Congo et à l’internationale.

À travers le buste de Nkulula, Kambale souhaite immortaliser le combat mené par Luc et ses camarades, dont les efforts ont eu un impact positif sur la société congolaise. À travers le buste de Nkulula, Kambale souhaite immortaliser le combat mené par Luc et ses camarades, dont les efforts ont eu un impact positif sur la société congolaise. Kambale veut ainsi rappeler que les actions de Luc n'ont pas été vaines et qu'elles ont été reconnues par la population. «  J’ai fait cette œuvre pour dire que les efforts que Luc avait fait quand il était vivant n’ont pas passé inaperçu dans la population », a-t-il déclaré. 

Parmi les artistes qui l'inspirent, Kambale mentionne Philly Farreau. Il découvre régulièrement les œuvres de cet artiste sculpteur talentueux sur les réseaux sociaux et espère un jour réaliser une œuvre qui se rapproche de son style unique.

En tant que visionnaire, Kambale rêve d'avoir une fille qui embrassera également la sculpture, contribuant ainsi à l'égalité des sexes dans ce domaine artistique. Il souhaite également fréquenter une bonne école d'art et ouvrir sa propre galerie d'art, offrant ainsi une plateforme pourra exposer et vendre les créations d'artistes locaux. Comme Styno, il est essentiel de soutenir les talentueux artistes sculpteurs de la ville de Goma et de la RDC dans leur quête de reconnaissance et de prospérité. Leurs œuvres captivantes et empreintes de culture locale et nationale méritent d'être célébrées et préservées. En encourageant leur travail, non seulement nous soutenons l’expression artistique de la région, mais nous contribuons également au développement économique et social de la communauté artistique locale. 

• La redaction

« Ambulant » : l’expo-photo qui valorise l’économie urbaine congolaise

Photographe congolaise basée à Goma, Joyce Kipunga, a verni le 3 juin sa première exposition photo intitulée « Ambulant » dans la grande salle de Tulizo Elle Space, dans la ville touristique. Cette série de tableaux met en lumière les vendeurs ambulants de la RDC, et de la ville de Goma en particulier, qui font partie intégrante de l’économie urbaine de la région.

L’exposition photo de Kipunga, qui se lance dans la photographie documentaire avec « Ambulant » présente un regard profond sur le rôle essentiel que jouent les vendeurs de rue dans la ville de Goma et les défis auxquels ils sont confrontés dans leur travail quotidien. La jeune artiste visuelle, qui poursuit en parallèle les études en communication, s’est inspirée de sa mère, ancienne vendeuse ambulante. Elle vendait des babouches importées du Burundi qu’elle distribuait dans les boutiques de Goma.

« Je me suis inspirée de ma mère car j’ai compris que malgré la société dans laquelle elle vit, elle n’a pas eu honte d’être une vendeuse ambulante pour nous nourrir », a souligné Joyce. « Déjà que mon père est policier, ma mère avait cette envie d’aider et cela par tout ce qu’elle avait comme moyen ».

Les vendeurs ambulants, piliers de l’économie informelle de la RDC

Ambulant Expo à Tulizo Elle Space - credit : Prudent Kubuya for mnkfcreatives, 2023.

A part sa mère, Nabintu est au centre de l’exposition. Ses clichés surplombent le mur de la grande salle de TES. Celle-ci est une mère de deux enfants qui vend dans les rues de Goma les fretins grâce auxquels elle nourrit et soigne ses enfants. C’est la principale source de revenu de son foyer, son mari étant au chômage depuis plusieurs années.

Dans plusieurs villes de la RDC, les vendeurs ambulants vendent une grande variété de produits, allant des fruits et des repas préparés aux produits de beauté, aux vêtements et aux produits électroniques. Ils constituent la majorité de l’économie informelle au Congo, l’un des taux de travail informel les plus élevés au monde, avec environ 80% des travailleurs urbains engagés dans l’économie informelle, selon la Banque mondiale (2018). La confédération syndicale congolaise estime quant à elle que le secteur emploie 97,5 pour cent des actifs du pays.

Joyce Kipunga à Tulizo Elle Space - credit : Prudent Kubuya for mnkfcreatives, 2023.

Les photographies de Kipunga mettent en relation les principales identifications de ce commerce avec les mutations des villes congolaises. Elles donnent un aperçu du rôle important que jouent les vendeurs de rue dans la ville de Goma en facilitant l’accès à des biens et services abordables aux populations locales. « L’exposition a pour objectif de rendre hommage aux marchands ambulants, faire connaître à la communauté qu’un marchand ambulant, c’est un travail comme tout autre, qui peut nourrir, scolariser et prendre soin d’une famille », a déclaré Joyce pour la motivation derrière son expo.

Ambulant, réfléchir aux défis de ces travailleurs essentiels

Joyce Kipunga à Tulizo Elle Space - credit : Prudent Kubuya for mnkfcreatives, 2023.

Les vendeurs ambulants constituent souvent la principale source de revenus pour de nombreuses familles congolaises, et ils paient également une partie des impôts locaux. La série, constituée de 32 tableaux, vise à projeter le courage de ces travailleurs, qui subviennent aux besoins de leur famille et paient les frais de scolarité de leurs enfants. La rue joue un rôle crucial dans la survie des populations et le commerce ambulant est un pilier du patrimoine historique et culturel de la RDC.

Joyce Kipunga à Tulizo Elle Space - credit : Prudent Kubuya for mnkfcreatives, 2023.

Entre aborder les marchands ambulants, obtenir l’autorisation de les capturer, enregistrer leurs histoires et présenter et corriger le projet par l’incubateur, Joyce Kipunga a fait 10 mois de travaux. Son exposition est incubée à Tulizo Elle Space qui est un centre de formation et de transit artistique dédié à la jeune femme, basé à Goma. Le projet de Joyce a été dirigé par la directrice du centre, Pamela Tulizo, elle-même photographe documentariste et journaliste. Kipunga est aussi la première à faire une exposition photo parmi les participantes du programme « Da Msani » de TES qui met en place des formations artistiques aux jeunes filles.

« Ambulant » est une invitation à réfléchir sur la place des vendeurs ambulants dans la société congolaise et sur les défis auxquels ils sont confrontés. Il est également une célébration de leur contribution à l’économie locale et au dynamisme de la vie urbaine. L’exposition est disponible jusqu’au 9 juillet 2023.

• MNKF CREATIVES, David Kasi.